Ce rapport a été produit par OCHA en collaboration avec les partenaires humanitaires et concerne les vagues de déplacements internes depuis le 21 juillet 2015. Il est publié par OCHA Tchad et couvre la période du 15 juillet au 23 août 2016. Le prochain rapport sera publié vers le 15 septembre 2016.
Faits saillants
Plusieurs incidents sécuritaires récents ont affecté l’accès humanitaire dans les zones frontalières, où les opérations militaires se poursuivent.
La récurrence des fausses alertes pour attirer l’assistance humanitaire souligne la nécessité de renforcer la sensibilisation sur les principes humanitaires.
Un dépistage de la malnutrition auprès de plus de 800 enfants par l’ONG IRC souligne 16,3% de cas de malnutrition aigüe sévère et 17,6% de cas de malnutrition aigüe modérée.
Le monitoring de protection sur 14 sites entre Liwa et Daboua, réalisé au début du mois d’août, a permis d’identifier 61 incidents de protection.
80 616 déplacés enregistrés depuis mai 2015
Dont :
- 69 057 déplacés internes
- 11 239 retournés Tchadiens
- 320 ressortissants des pays tiers
Source: Cluster Abris / AME / CCCM - OIM (Matrice de suivi des déplacements du 25/08/2016).
37 876 déplacés* estimés pas encore enregistrés.
Source: Cluster Abris / AME / CCCM - OIM (25/08/2016.).
7 004 réfugiés dont 5 432 dans le camp de Dar-es-Salam depuis janvier 2015.
Source: HCR/CNARR (31/07/2016)
Aperçu de la situation
La situation sécuritaire reste fragile dans la région du Lac, avec plusieurs incidents sécuritaires dans les zones frontalières, où les opérations militaires sont toujours en cours. Selon les autorités de Kaiga, à proximité de la frontière avec le Niger, le 30 juillet, un véhicule de transport public aurait explosé sur une mine entre Kaiga et Boma, causant trois blessés. C’est le troisième incident lié à des mines en 2016, après le 12 mai à Kaiga-Ngouboua et le 1er juin entre Kaiga-Ngouboua et Kaiga-Litri. Par ailleurs, entre le 26 et le 30 juillet, sept civils auraient été tués et huit femmes kidnappées dans la sous-préfecture de Kaiga. Depuis la mi-août, des sources sécuritaires rapportent plusieurs incidents dans la zone de Kaiga Kinjiria. Le 14 août, une attaque au village de Fotio, à côté de Kaiga Kinjiria, aurait causé la mort d’un habitant. Dans la nuit du 16 au 17 août, une attaque aurait eu lieu à Boultoua, à 3km de Tchoukoutalia, causant un mort et deux blessés. La nuit suivante, des attaques auraient simultanément touché les villages de Djillom, Moundi et Ndjalia, aux alentours de Daboua, causant deux morts et le vol de plus de 1 000 têtes de bétail. Ces différents incidents ont affecté l’accès humanitaire avec des conséquences sur les personnes vulnérables dans la zone frontalière avec le Niger et le Nigéria, plusieurs partenaires ayant déjà suspendu leurs opérations dans cette zone du fait des incidents sécuritaires. Dans la zone de Kaiga Kinjiria, près de 8 000 personnes déplacées et 800 réfugiés pourraient être privés d’assistance. Par ailleurs, deux pillages de vivres par les populations ont été enregistrés au cours de distributions, soulignant l’importance de la sensibilisation avant, pendant et après les distributions.
Les fausses alertes se multiplient dans la région du Lac, afin d’attirer l’assistance humanitaire. Ainsi, une alerte avait été lancée le 2 août concernant des inondations dans 24 villages à l’ouest de Baga-Sola, qui auraient entrainé le déplacement d’environ 1 000 personnes. Cependant, la mission inter-agences composée de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), du Programme Alimentaire Mondial (PAM), de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) et d’OCHA qui a évalué la situation à Tchoukoudoum le 4 août n’a pas constaté d’inondations ni de besoins humanitaires urgents, mettant en évidence une fausse alerte lancée par les populations et relayées par les autorités locales en vue de bénéficier de l’assistance humanitaire. La récurrence des fausses alertes, après celle de Kaiga Kinjiria en juin, souligne la nécessité d’améliorer la connaissance des autorités sur les principes humanitaires, notamment le principe d’impartialité selon lequel l’action humanitaire se base sur une analyse des besoins les plus urgents selon des critères de vulnérabilité.
La situation ne s’est pas améliorée dans la région du Lac depuis janvier 2016, selon la deuxième évaluation multisectorielle REACH (juin 2016). L’enquête a été réalisée entre avril et juin 2016 dans 267 villages et 84 sites de déplacements dans l’ensemble de la région. Les principaux résultats indiquent que les mouvements de population restent dynamiques : la majorité des villages enquêtés a connu des départs et des arrivées de déplacés, principalement à cause de la situation sécuritaire et de l’insécurité alimentaire. Les résultats soulignent également que ces déplacements entraînent une pression sur les services de base, et indiquent que l’accès aux services de santé s’est détérioré. Dans ce contexte, le risque de dégradation de la cohésion sociale et de tensions entre déplacés et communautés hôtes pourrait s’accentuer : dans un quart des villages enquêtés, on observe des tensions, et 28% des personnes enquêtées estiment que des tensions « pourraient émerger dans le futur ».